La Revue des Étoiles Doubles

Les différents types d'étoiles doubles

Étoiles doubles visuelles

On parle d’étoile double visuelle pour designer un couple d’étoiles dont la séparation est possible visuellement, qu’il s’agisse d’une observation directe ou d’imagerie.

Les astronomes qui se consacrent à ce type d’étoiles doubles parlent de la « mesure » des étoiles doubles visuelles.

Mesurer une étoile double visuelle : en quoi ça consiste ?

La mesure d’une étoile double visuelle consiste à déterminer deux grandeurs qui sont l’angle de position et la séparation des deux composantes à une date donnée.

La composante principale est généralement l’étoile la plus brillante du couple, mais ce n’est pas toujours vrai. Dans les catalogues, il arrive que la composante principale ne soit pas l’étoile la plus brillante du couple mais cela reste assez rare. Les raisons de cette erreur peuvent être multiples. Par exemple en présence d’étoiles variables et/ou de magnitudes proches.

Mesure etoile double : Rho et Thêta

L’angle de position et la séparation correspondent aux coordonnées polaires de la composante secondaire par rapport à la composante primaire.

La valeur de l’angle valeur est exprimée en degrés et décimales. Elle est nommée Thêta avec le symbole θ.

La séparation des deux composants est exprimée en secondes d’arc et est nommée Rhô avec le symbole ρ.

Avant l’arrivée des caméras CCD, le micromètre à fil et ses variantes étaient utilisés par les astronomes pour mesurer les étoiles doubles. P DURAND dans son article de 1979 en proposait la fabrication pour les astronomes amateurs. http://articles.adsabs.harvard.edu//full/1979LAstr..93..375D/0000375.000.html. De nos jours, ce sont les caméras CCD associées à des logiciels informatiques spécialisés qui sont les plus usitées.

Le matériel

Un télescope ou une lunette astronomique et une caméra suffisent pour débuter. On privilégiera les instruments à longue focale et/ou l’utilisation de lentille de Barlow pour augmenter la résolution de la chaîne de mesure. Une monture équatoriale est conseillée car elle facilitera le pointage de la cible et évitera des calculs à l’observateur. Une mise en station correcte est nécessaire pour limiter les erreurs de mesures dues à la rotation de champ.

Le pouvoir séparateur est la distance minimum qui doit exister entre deux détails voisins pour qu’un instrument optique les distinguent de manière individuelle. C’est donc une notion particulièrement utile dans le domaine des étoiles doubles.  C’est une grandeur optique qui dépend uniquement du diamètre instrumental et de la longueur d’onde. On l’évalue habituellement à partir de la longueur d’onde centrale du spectre visible qui correspond au vert. Il se calcule alors ainsi :

R = 120/D où R est le pouvoir séparateur en seconde d’arc et D est le diamètre instrumental en mm.

Il est donc théoriquement possible de séparer deux étoiles distantes d’une seconde d’arc avec un instrument de 120mm de diamètre. Cela nécessite toutefois une optique de qualité, bien collimatée et d’une turbulence insignifiante.

La résolution est une notion essentielle utilisée en imagerie, faisant intervenir la taille des photosites de la caméra. Elle se calcule ainsi :

R = 206 x T / F où R est la résolution en seconde d’arc/pixel, T est la taille des photosite en micron et F est la distance focale du système optique en mm.

Il est souhaitable de disposer d’une résolution 10 fois inférieure à la séparation du couple que nous voulons mesurer. Ainsi, produire l’image d’un couple dont la séparation est égale à 1 seconde d’arc nécessite une résolution de l’ordre de 0.1 seconde d’arc par pixel. Autrement dit, dans ces conditions, les deux photocentres sont distants de 10 pixels sur l’image résultante. Obtenir une telle résolution nécessite le plus souvent d’augmenter la distance focale native de l’instrument avec une lentille de Barlow.

La méthode de capture

La méthode de capture est dite de l’ « image chanceuse » (Lucky Imaging). Cette technique est utilisée par les astronomes amateurs en imagerie planétaire. Pour limiter les effets de la turbulence atmosphérique, le temps de pose devra être le plus court possible. Une vidéo ou une série de plusieurs centaines d’images est d’abord produite. Le prétraitement consiste à trier les images en termes de qualité en commençant par la meilleure puis de les aligner. Et pour finir, d’additionner un certain nombre d’images pour obtenir l’image finale du couple. C’est cette image que l’observateur utilisera pour les mesures.

La phase de réduction

La réduction consiste à obtenir les valeurs de Thêta et de Rho à partir de l’image résultant du pré-traitement décrit plus haut. REDUC est un logiciel particulièrement efficace dédié à cette phase de réduction. Il est décrit ici. Pour l’obtenir, adressez un mail à son auteur, Florent LOSSE.

La première étape consiste à étalonner le champ de la caméra. On peut pour cela s’appuyer sur l’image d’un couple dont les valeurs de Thêta et de Rho sont connues (on parle de couple étalon). L’étalonnage en angle peut également résulter d’un filé d’étoile enregistré monture arrêtée. Le filé obtenu indique alors exactement la direction de l’ouest, on en déduit aisément l’orientation complète du champ.

On travaille ensuite sur l’image du couple à mesurer. En quelques clics, REDUC fournit très simplement les valeurs d’angle et de séparation. S’y ajoute une évaluation de la précision de la réduction ainsi que de la différence de magnitudes entre les composantes.

La date doit être exprimée en époque julienne. Vous pouvez utiliser notre calculateur pour convertir la date calendaire dans le format approprié.

Binaires spectroscopiques

Les étoiles doubles spectroscopiques sont détectées grâce aux variations périodiques que présente leur spectre.

Il peut s’agir d’un élargissement voire du dédoublement des raies, ou du déplacement périodique de celles-ci. Ces variations révèlent une variation cyclique des vitesses radiales qui s’explique par les alternances d’approche et d’éloignement de chaque composante du couple, en mouvement orbital autour du centre de masse du système.

En 1888, Hermann Karl VOGEL examina le spectre d’Algol, étoile située dans la constellation de Persée, dont on savait que les variations périodiques de luminosité étaient causées par les éclipses mutuelles de deux composantes d’un système binaire. Il y observa les déplacements périodiques de son spectre, témoins du mouvement de révolution de l’étoile principale autour du centre de masse de système. Cette observation a montré que l’on pouvait déduire la duplicité d’une étoile en étudiant son spectre.

On observe un déplacement des raies de l’étoile principale lorsque l’étoile secondaire est trop faible pour être visible. Les raies sont élargies ou doublées lorsque les deux spectres se superposent.

L’observation des binaires spectroscopique est difficilement accessible aux amateurs car elles nécessitent de disposer d’un spectrographe à haute résolution. Les binaires observées par cette méthode sont très serrées et présentent des périodes de révolution courtes de l’ordre de quelques jours à quelques mois.

L’image ci contre montre le dédoublement des raies du spectre de l’étoile 57 Cygni.

Spectre d'une étoile double spectroscopique
Crédit : Christian Buil

Binaires à éclipse

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On appelle binaires à éclipses des étoiles doubles identifiées grâce aux éclipses mutuelles qui s’opèrent entre elles lors du parcours de leurs orbites autour du centre de masse. La visibilité des ces éclipses suppose que notre axe de visée est approximativement aligné avec le plan orbital de la paire.

La technique d’observation de ce type d’étoile double est celle des variabilistes. Il s’agit de dater précisément ces éclipses qui se traduisent par des variations de magnitude.

Algol est la plus fameuse étoiles double appartenant à cette catégorie. La période orbitale du couple est de seulement 2.87 jours, ce qui s’explique par la proximité des deux composantes distantes de seulement 5% de la distance Terre-Soleil.  Dans le cas de couple très proches, les étoiles sont déformées et il peut même y avoir échange de matière entre elles. Une binaire à éclipse peut également être identifiée comme binaire spectroscopique.

L’observation de ce type d’étoiles doubles très serrées est à la portée des amateurs même équipés d’instrument de modestes diamètres. Il s’agit de constituer la courbe de luminosité du couple à proximité de l’éclipse. Cette courbe sera d’autant plus précise qu’un grand nombre de mesures, potentiellement réalisées par des observateurs différents, sera effectué au voisinage d’une éclipse. Ces observations supposent de connaitre au moins approximativement la date des phénomènes recherchés.

Type Algol

Les composantes sont détachées et ont une forme sphérique ou proche de la sphère

Courbes de lumière d'une binaire algolide

Type Béta Lyrae

Les composantes sont proches du contact et ont des formes d’ellipsoïdes

Courbes de lumière d'une binaire à éclipse

Type W Ursae Majoris

Les composantes sont au contact et ont une enveloppe commune. Elles ont une forme ellipsoïdale marquée.

 
 
Courbes de lumière d'une binaire à éclipse